Le curage des caniveaux à Bamako est un bon facteur de prévention des inondations, si les collecteurs avaient été mis en place selon une étude préalable, soutiennent certains chercheurs universitaires, d’autres techniciens se penchent sur l’aménagement de ces collecteurs en vue de minimiser les inondations dans la ville.
Il est 18h45, sur le tronçon feu-tricolore-Hotel Wassoulou, environ cinq cent mètres de long, de nombreux tas de boues et d’ordures diverses sont visibles. “Nous faisons le curage de nos caniveaux, chaque année. Nous préférons attendre la période hivernale puisque c’est plus facile“, stipule Aminata Traoré, mère de famille habitant le quartier.
Les rues de Bamako regorgent, pourtant, de déchets drainés par les eaux de pluie en cette période hivernale. Jacques Dembélé, hydro-météorologue est chercheur à l’université des Sciences Sociales et de Gestion de Bamako, précisément à la Faculté d’Histoire et Géographie ; selon ses constats, « le curage des caniveaux peut aider à la prévention des inondations mais le grand problème se situe au niveau de la source même de ces eaux qui inondent. Les eaux quittent les collines pour se déverser dans le fleuve, cependant les collecteurs ne suffisent pas à évacuer le trop-plein », a-t-il soutenu. “Notre capitale souffre énormément de cela. Plusieurs foyers profitent de cette saison de pluie pour déverser les ordures ménagères dans les caniveaux, ce qui est très favorable aux inondations“, révèle Mahamadou Kaya, ingénieur sanitaire. Il est l’actuel Directeur Nationale de l’assainissement et du contrôle des pollutions et nuisances (DNACPN).
Cette direction s’occupe de tout ce qui se rapporte à l’assainissement et à la diminution, sinon l’effacement des pollutions et des nuisances environnementales, entre autres (voir « Encadré »).
Le curage des caniveaux est en cours dans toutes les six communes du district de Bamako. Les dépôts de transit sont engorgés et les mairies à elles seules n’arrivent pas à évacuer le trop-plein de déchets liquides comme solides. Les principaux collecteurs de la ville sont tous recensés et seront aménagés, selon un programme mis en place. Cela est l’un des résultats d’une étude (non encore accessible), menée par le soutien de la banque allemande KFW. Il s’agit d’une étude de base qui permettra de mener d’autres études et réaliser un certain nombre de projets à travers la DNACPN. (Voir Schéma pour illustrations) Selon le Directeur, “les inondations seront considérablement réduites avec la mise en œuvre de ce programme d’aménagement qui s’élève à un coût de sept (7) milliards de FCFA“. Un projet financé pour une durée de trois (3) ans, avec comme priorité accordée aux deux rivières Woyowoyanko et Tchienkolé, respectivement en commune 3 et commune 1 de Bamako. (Voir tableau).
Ce projet comprend également la finition du schéma directeur d’assainissement de Bamako, basé sur trois points essentiels: les eaux usées, les eaux pluviales et les déchets solides. “Nous allons calibrer à nouveau les collecteurs d’eaux usées, renforcer les parois et maîtriser les débits. C’est sur la base d’études techniques très poussées que nous sommes parvenus à ces résultats et d’autres résultats sont attendus à l’issue de ces travaux que nous entamerons bientôt. Le financement est déjà acquis. Actuellement, le projet est en phase de signature de contrat avec le bureau d’ingénieurs qui sera chargé de l’exécution et du suivi“, éclaire M. Kaya.
Enfin, une vaste campagne de sensibilisation et de communication est prévue à l’endroit des populations afin qu’elles adhèrent et adoptent pour de bon, le projet d’assainissement en question. Selon Jacques Dembélé, Hydro-météorologue à la Faculté d’Histoire et de Géographie de Bamako, « les collecteurs viennent en appui aux rivières naturelles présentes, pour évacuer l’eau dans le fleuve. Toutefois, l’eau du fleuve lors des périodes de grande crue se déverse dans les rivières, d’où la fréquence des inondations à Bamako », souligne-t-il. Chaque année, les inondations occasionnent des pertes en vies humaines au Mali. En 2013, à Bamako, une vingtaine de personnes ont perdu la vie due aux inondations. En 2016, les journaux évoquent déjà plus de dix morts à cause des inondations « les pertes en vies humaines, les pertes de zones sont généralement les grands dégâts causés par les inondations », rappelle M. Dembélé.
Pour Jacques Dembélé, la meilleure manière d’éviter les inondations est de « stopper l’arrivée de l’eau à partir des collines et trouver des moyens de réguler et cette eau pourrait même être utilisée à d’autres fins », ajoute-t-il.Les Chercheurs universitaires et les techniciens n’ont pas un cadre de dialogue ou d’échanges de résultats. « Nous n’avons pas l’habitude de travailler ensemble. L’idéal serait que nous travaillons ensemble notamment dans la restitution des résultats de recherche afin que cela puisse être appliqué sur le terrain », explique-t-il. Le Directeur de l’Assainissement et du Contrôle des Pollutions et Nuisances, M. Kaya résume cette collaboration dans les échanges avec les Chercheurs pour le cadre spécifique des études sur les Pollutions et les Nuisances. « Avoir des bonnes relations avec les Universitaires serait très très bénéfique pour le rayonnement du secteur. Cependant, les étudiants désertent même la filière hydrologie, au profit d’autres», ajoute-t-il.
Aucune étude spécifique n’existe au Mali, sur le schéma hydraulique de la ville de Bamako. Des recherches sont en cours afin de combler ce vide. De nombreuses études sont en train d’être menées sur les inondations dans la ville de Bamako, nous a confié M.Dembélé, sous sa supervision, notamment par des étudiants en phase terminale de leur cycle.
Diénéba DEME, Journaliste scientifique
Encadré
MISSIONS DE LA Direction Nationale de l’Assainissement et du Contrôle des Pollutions et Nuisances (DNACPN)
La DNACPN a été créée par Ordonnance N°98-027/P-RM du 25 août 1998 ratifiée par la loi N°98-058 du 17 décembre 1998.
Elle a pour mission l’élaboration des éléments de la politique nationale en matière d’assainissement et du contrôle des pollutions et des nuisances et d’en assurer l’exécution. A ce titre elle est chargée de
- Suivre et veiller à la prise en compte par les politiques sectorielles, les plans et programmes de développement, des questions environnementales et la mise en œuvre des mesures arrêtées en la matière ;
- Assurer la supervision et le contrôle technique des procédures d’Etude d’Impact sur l’Environnement (EIE) ;
- Élaborer et veiller au respect des normes nationales en matière d’assainissement, de pollutions et de nuisances;
- Assurer le contrôle et le respect de la législation et des normes en matière d’assainissement, de pollutions et de nuisances ;
- Assurer la formation, l’information et la sensibilisation des citoyens sur les problèmes d’insalubrité, de pollutions et de nuisances, en rapport avec les structures concernées, les collectivités territoriales et la société civile ;